L’Éditorial
Éditorial 2025

Irena Bilic
Fondatrice, réalisatrice et Déléguée générale
« Il ne s’agit pas aujourd’hui de révéler le cinéma social, pas plus que de l’étouffer en une formule, mais de s’efforcer d’éveiller en vous le besoin latent de voir plus souvent de bons films (que nos faiseurs de films me pardonnent ce pléonasme) traitant de la société et de ses rapports avec les individus et les choses. »
« Un chien andalou hurle, qui donc est mort ? Elle est soumise à dure épreuve, notre veulerie, qui nous fait accepter toutes les monstruosités commises par les hommes lâches sur la terre, quand nous ne pouvons supporter sur l’écran la vision d’un œil de femme coupé en deux par un rasoir. Serait-ce là spectacle plus affreux que celui offert par un nuage voilant la lune son plein ? »
Texte prononcé par Jean Vigo au Vieux-Colombier, le 14 juin 1930, lors de la seconde projection du film Un chien andalou de Luis Buñuel.
Chers amis, cinéastes et spectateurs, chers partenaires,
En 2025, nous célébrons la vingtième édition du Festival L’Europe autour de l’Europe.
Près de 1 500 films européens, des origines du cinéma à aujourd’hui, inédits ou redécouverts, ont été montrés, présentés, défendus ; des rencontres avec les classiques, les maîtres, les cinéastes contemporains, les auteurs en devenir, arrivés à Paris depuis tout le continent ; 150 stagiaires accompagné(e)s ; de belles collaborations avec les salles parisiennes où s’est faite l’histoire du cinéma d’auteur ; des jurys parmi les plus qualifiés, parfois présidés par des légendes du cinéma européen. Et une équipe loyale, passionnée. Et des amis, sans lesquels on n’arrive à rien.
Le trait général qui caractérise les films contemporains de production récente, organisés en trois compétitions — Prix SAUVAGE, Prix PRESENT et Prix SAUVAGE CORTO — est leur proximité avec la vie. La vision de leurs auteurs est sereine, analytique, détachée, dépourvue de tout penchant pour le tragique.
Un contraste frappant avec les univers de David Lynch, d’Aleksandar Petrović, de Lucian Pintilie et d’Alexandre Sokourov, qui, chacun à sa manière grandiose et unique, voient le monde dans des tons inéluctablement gris, ou égaré dans le mensonge, la manipulation, et finalement, fatalement, le crime. Et cela est universel.
Dans ces temps sombres, absurdes et cruels, un thème s’est imposé comme un repère dans le brouillard — Tell Me Lies, d’après le titre du film de Peter Brook.
« Les fous ne savent pas qu’ils sont fous », dirait August Strindberg. Mais notre mission, à nous, c’est de ressentir, d’identifier et de montrer le cinéma de demain !
Parce que nous avons à la fois l’espoir et la certitude que les films changent le monde.
C’est le moment de saluer tous ces cinéastes qui mettent dans leurs films des années d’attente, d’espoir, d’effort — leur cœur tout entier.
Belles projections et rencontres,