L’éditorial
Le Bal ouvre la onzième édition de L’Europe autour de l’Europe. Pour rendre hommage à Ettore Scola, et introduire le thème Chaos et harmonies, miroir de cet univers où règne la peur de la grande Histoire, sentiment tempéré par la nostalgie de l’harmonie.
Le contexte historique d’aujourd’hui, de la crise des migrants et de la menace du terrorisme, (terminologies banalisées), ces guerres qui s’épanouissent et le commerce florissant des armes et des êtres, a été, très certainement, décisif pour cette sélection. Le festival consacre des cycles aux anniversaires de la Grande guerre, la Guerre civile d’Espagne, l’Insurrection de Budapest, la Première guerre de Tchétchénie. András Kovács, auteur de Jours glacés déclare : « …Je pense que chaque peuple doit affronter ses propres fautes, les pages honteuses de son histoire, car c’est la seule manière d’en libérer les consciences individuelles. Et cette confrontation est en grande partie la tâche des arts et des artistes.»*
Nous feront l’honneur de leur présence à Paris, avec leur films : Marlen Khoutsiev, Károly Makk, Carlos Saura, Hans-Jürgen Syberberg, István Szabó, Béla Tarr. Immenses cinéastes, ils ont tous interrogé l’Histoire en explorant la responsabilité et la souffrance des innocents entraînés dans la tourmente de l’Histoire monumentale. Les auteurs des deux compétitions du festival, le Prix sauvage et le Prix Présent, portent aussi en eux l’inquiétude quant à la réalité de notre temps. Puisse l’atmosphère du festival leur être bénéfique.
La cinématographie des Pays-Bas sera à l’honneur avec les chef-d’œuvres du cinéma muet à la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé, les oeuvres classiques de Bert Haanstra, Joris Ivens, Johan van der Keuken, Fons Rademakers, et les joyaux du cinéma expérimental… Le doyen Louis van Gasteren présentera ses films. Méliès, le créateur du spectacle cinématographique, est lui aussi d’origine néerlandaise. L’Europe est vraiment petite.
Également au programme une belle sélection de films du Québec et d’Acadie, nos invités francophones d’outre-mer…
« Le temps n’existe pas » est le dernier postulat de la physique, m’a expliqué hier un ami mathématicien. C’est compréhensible, intuitivement. Je m’étais déjà interrogée : dans quel chef-d’œuvre du passé ou de l’avenir jouons-nous ? Nous, les danseurs infatigables du Bal.
Excellentes projections et belles rencontres,
Irena Bilic
Fondatrice et déléguée générale
*Propos recueillis par Istvan Szugan , Entretien avec Andras Kovacs, Image et son, la revue du cinéma N°217, mai 1968