Deixem-me ao menos Subir às Palmeiras / Laissez-moi au moins grimper aux palmiers

de Joaquim Lopes Barbosa

(Fiction, Portugal, 1972, 85’, NB, VOSTF)

avec Estevão Macunguel, Gabriel Chiau, Helena Ubisse, Malangatana Valente

Deixem-me ao menos Subir às Palmeiras

De longs plans séquences sur des travailleurs agricoles maltraités par le contremaître noir. Dans leur belle maison les propriétaires blancs sourient. Las des abus, des coups, des humiliations, les paysans tentent un geste de révolte, vite matée par le patron. Le jeune Dino aura le courage de partir.


« Le cinéma doit être un front de guerrilha contre les tabous, la pseudo-morale et les lieux communs. Le cinéma est une arme, car il peut alerter, amener les gens à réfléchir. Ce film était un défi. Mais je ne pouvais faire différemment. » Joaquim Lopes Barbosa

La police politique surveille le tournage sans trop l’inquiéter car le producteur travaille pour le régime. Pour tenter de déjouer la censure, Lopes Barbosa fait interpréter le cruel contremaître blanc par un Africain et double en anglais les dialogues des propriétaires blancs. Les paysans parlent le ronga, une langue du Mozambique. 

Le film est radical, engagé mais n’est pas un manifeste politique. Son esthétique est puissamment poétique. Les cadres et les perspectives des plans séquences, le regard sur les paysans sont d’un lyrisme épuré. Des chants d’une beauté poignante portent plusieurs scènes.

Joaquim Lopes Barbosa
Joaquim Lopes Barbosa

Joaquim Lopes Barbosa (1945-2021), né à Porto, est parti un peu à l’aventure en Angola à la fin des années 60. Il découvre la violence et l’injustice de l’exploitation coloniale et rencontre des poètes, militants du MPLA, Viriato da Cruz, António Jacinto. Passionné par le Cinema Novo brésilien, il réalise un court-métrage O Regresso. Puis il part à Lourenço-Marques, pour travailler au sein d’une maison de production de publicités et de documentaires. Le producteur accepte de lui donner les moyens – équipe, pellicule, matériel – pour son premier long-métrage, adapté d’une nouvelle du mozambicain Luis Bernardo Honwana. Il tourne en pleine campagne avec des paysans et aidé par le peintre Malangatana. Le film est totalement interdit par la censure et le cinéaste doit s’enfuir précipitamment à Lisbonne. Après le 25 avril 1974, la première, prévue pour le 7 septembre à Lourenço Marques, est empêchée par la révolte des colons. Au Portugal, Lopes Barbosa réalise des documentaires puis dans les années 80, il revient au Mozambique où il crée une maison de production et où il restera jusqu’à sa mort. Sa fiction iconoclaste, un des très rares films anti-colonialistes antérieurs à 1974, sera oubliée pendant plus de trente ans.

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